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Little Big Planet : Au-delà de l’espérance

Sony a donc eu raison de parier sur LittleBigPlanet. Le jeu est une véritable pépite qui ne déçoit dans aucun des registres qu’il approche.

Little Big Planet

Du formidable jeu de plate-forme pas si traditionnel caché derrière une partie créative annoncée à grands cris, la réalisation dépasse de loin toutes les espérances. De menus en fonctions, d’interfaces en icônes, de dialogues en bruitages, de sonneries en musique, LBP suinte l’amour des choses bien faites, l’envie de faire plaisir. Faussement naïf, plus souvent doucement subversif, le rendu photo réaliste façon atelier papiers ciseaux de cours de travaux manuels habille chaque centimètre carré du jeu avec un charme et une personnalité folle. De la manipulation des menus, si riche et importante dans la partie création de niveaux, au jeu lui-même, il y a ici une compréhension intime des plaisirs interactifs fondamentaux. À commencer par le contrôle réjouissant de l’attachant héros Sackboy, inséparable du réactif menu « Pop-it » qui l’accompagne en permanence et où se stockent tous les items et les fonctions de décoration ad hoc des endroits qu’il traverse. Parmi les effets révolutionnaires du jeu, la collecte des centaines d’objets éparpillés dans les niveaux n’a jamais été aussi utile puisque, tous différents, ils se rendent indispensables à la création de niveaux originaux. Pari risqué finalement réussi pour le présent et l’avenir de la PlayStation 3 : auprès des gamers, du grand public et des médias, LittleBigPlanet cautionne à lui seul et de manière unique l’existence de la console.


Les plus…

  • L’état d’esprit général et l’originalité du tout
  • L’accessibilité de chaque étape, jeu pur ou création
  • Le touché
  • L’humour visuel, sonore et tactile
  • Le rendu graphique jamais vu
  • La recherche sonore et musicale
  • Le charisme du personnage

Les moins…

  • La richesse visuelle peut devenir enivrante
  • La densité du mode création peut intimider
  • Où sont les flingues ?

François Bliss de la Boissière

(Publié le 4 novembre 2008 sur Gameweb.fr)

 


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Comme dans la rue, pas de minimum requis. Ça fera plaisir, et si la révolution des microtransactions se confirme, l’auteur pourra peut-être continuer son travail d’information critique sans intermédiaire. Pour en savoir plus, n
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LittleBigPlanet : 2 patchs et une première larme

La suppression de la magnifique voix du chanteur malien n’indigne pas, elle fait mal au cœur d’un point de vue artistique.

Little Big Planet patché

Entre les nuits du 22 et 23 octobre 2008, la version du jeu LittleBigPlanet entre les mains de certains privilégiés et de la presse a eu droit à 2 patchs correctifs. Un premier a fait passer le jeu en version 1.1 et, quelques heures plus tard, un nouveau patch de 59 Mo transformait le jeu en version 2.2. À la surprise générale, la première modification ne supprima pas la chanson contenant les deux phrases litigieuses en malien. Premier à enquêter sur le coup, le magazine anglais Eurogamer.net  laisse entendre que les changements, presque invisibles et difficiles à vérifier, concernent des fonctionnalités en ligne et ajoutent de nouveaux habits à récupérer dans le jeu pour son personnage Sackboy.
Le 2e patch, lui aussi obligatoire à installer au moment du lancement du jeu (possibilité de refuser mais le jeu se bloque alors sur la sélection du joueur et des amis et l’accès aux serveurs LittleBigPlanet est toujours impossible à l’heure où nous écrivons) corrige bel et bien la chanson. Cependant, au lieu de la supprimer, elle se contente de la passer en version instrumentale. Le dommage est donc minime surtout pour ceux qui joueront le jeu commercialisé dans le monde entier sous cette forme (7 novembre en Europe, 27 octobre aux USA). Mais pour les quelques privilégiés, officiels (presse), ou clandestins (des exemplaires du jeu ont été vendus aux USA avant retrait des boutiques), qui ont commencé à traverser les niveaux de la « planète des songes », le mal est plus grand. Au-delà des cris d’indignation et des manifestations virtuelles contre un rectificatif vite qualifié de « censure », légitime par principe, mais sans doute un peu exagéré dans ce cas précis, le véritable dommage est artistique et affectif. Car la voix du chanteur malien manque terriblement au niveau qu’elle illustrait.

La musique est un message

Comme la formidable première démo d’une désormais célèbre session de la Game Developers Conference (GDC) de San Francisco en 2007 l’avait merveilleusement montré, l’illustration sonore et musicale du jeu est aussi atypique, chaleureuse et frappante que les visuels. À l’instar de toutes les trouvailles graphiques, chaque chanson ou instrumental a été sélectionné avec la même créativité et la même volonté de rupture avec les habitudes du jeu vidéo. L’accompagnement musical est ainsi méticuleusement placé dans chaque niveau et participe énormément à créer l’ambiance voulue. Après avoir atterri dans un nouveau niveau, le héros Sackboy s’accommode progressivement aux lieux avec une bande son discrète faîte de bruits d’ambiance familiers ou intrigants, de cris d’animaux éloignés. La musique arrive généralement petit à petit pour atteindre des crescendos qui emportent le jeu avec elle. Elle se mélange parfois en rythme avec les bruitages et sons étranges. Le tout, toujours, dans un mélange d’humour et d’élévation d’âme.

Toumani Diabate photo DR

Dans le space

La chanson Tapha Nang que l’on peut écouter intégralement – dans une version hélas trop compressée – sur le myspace du respecté chanteur malien Toumani Diabate (3e titre listé dans le lecteur audio à droite) actuellement en tournée mondiale, illustre le premier niveau (Safari dansant) à thématique africaine du 2e monde du jeu. L’incongruité et la beauté de la voix et des paroles incompréhensibles en malien (pour la plupart des occidentaux et, visiblement pour Sony et le studio Media Molecule, sans doute premiers surpris d’apprendre le sens et l’origine des paroles) confirmaient après le premier monde déjà bien surprenant, que le jeu était parti pour déconcerter bien au-delà des premiers niveaux et des premières attentes. La chanson unique tournant en boucle tout le long du niveau, le refrain s’inscrit dans la mémoire à une vitesse surprenante. Encore une fois, le niveau garde toutes ses vertus même avec un morceau devenu instrumental. Mais l’effet de surprise et l’absence de cette mélodie entrainante et lancinante si inhabituelle dans un jeu vidéo, mutile, à cet endroit précis, une partie du message artistico-bucolique venant de l’espace que véhicule le jeu avec une candeur définitivement hors jeu.

Les paroles les paroles

Personnalité importante dans le développement du jeu avant de rejoindre Atari, l’ancien responsable des studios mondiaux de Sony Computer Phil Harrison explique au magazine anglais GamesIndustry.biz  que, d’après lui, Sony a pris « une bonne décision » en récupérant les exemplaires déjà distribués, mais pas encore officiellement en vente. « Je n’ai pas participé à ces discussions, précise-t-il, mais je sais qu’ils ont dû y penser très sérieusement et aux plus hauts niveaux de l’entreprise« . « Depuis le premier jour LittleBigPlanet est un jeu destiné au monde entier et s’il y avait la moindre chose qui devait diminuer cette vision, alors le jeu aurait fondamentalement échoué dans sa mission« . Remercié dans les crédits du jeu bien qu’il ne fasse plus partie de Sony Computer, Phil Harrison explique encore : « J’ai téléchargé la beta, je me suis assis pour jouer et, c’est assez rare que dans les 5 secondes après le début d’un jeu vous tombiez amoureux d’un bout de logiciel« .

Pas de sang, mais déjà des larmes

Sur leur site, les créateurs de Media Molecule s’excusent auprès des joueurs du report que ce changement occasionne sans trop rentrer dans les détails sauf à préciser que les paroles de la chanson en question sont bêtement passées au travers des procédures habituelles de test.
Même si se faire accuser de censure est un prix à payer est assez lourd pour une ignorance partagée par beaucoup, cet incident est au fond une bonne nouvelle. Il prouve que la créativité, allant jusqu’à se nicher dans une sélection de chansons internationales sortant des sentiers battus, est encore capable de passer à travers les batteries de tests appliquées à des logiciels en masse. Si Sony et Media Molecule avaient été informé de la chose avant le pressage du disque, personne n’aurait trouvé à redire ni rien remarqué. Une fois le niveau concerné pratiqué en version intégrale, il faut bien admettre que le choix artistique original était meilleur que le compromis. C’est cette entaille artistique là, la disparition de la voix et de la mélodie de Toumani Diabate qui fait le plus mal. Et l’on peut se demander combien d’autres idées étranges ou farfelues sont tombées au combat pendant le développement du jeu. L’étrange et hypnotisante LittleBigPlanet recèle-t-elle encore d’autres secrets ?

François Bliss de la Boissière

(Publié le 24 octobre 2008 sur Gameweb.fr)

 


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