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Le fol échiquier des sorties jeux vidéo d’un Noël qui n’en finit pas

Tel un pion capital sur un échiquier virtuel, Sega vient de placer la sortie de son important jeu japonais Bayonetta sur la date du 8 janvier en se vantant d’être le premier jeu de qualité AAA à sortir en 2010. Il rejoint en réalité un bataillon effroyable de blockbusters ayant esquivé Noël pour se tasser, cette fois, au premier trimestre de l’année. La gestion un peu folle du calendrier pourtant capital des sorties de jeux vidéo ressemble à un jeu d’échec qui chercherait encore une règle du jeu commune.

échiquier

C’est une tradition pas unique au jeu vidéo mais bien incrustée dans les mœurs de l’industrie interactive depuis au moins 20 ans. La ruée vers l’or collective a lieu dans les semaines précédant Noël. Un jackpot qui représentait il y a encore quelques années 60 % du chiffre d’affaire annuel. Un cauchemar économique et culturel pour les gamers réguliers qui voyaient les meilleurs titres se bousculer pendant une seule même période. Une tragédie aussi pour les créateurs de jeux obligés de boucler leur production dans des délais déraisonnables. Et, souvent, un drame pour les éditeurs lâchant leurs meilleurs titres dans une mêlée ouverte arbitrée non pas par les gamers presque érudits mais par le public familial qui achète un ou deux jeux par an, pratiquement au hasard. Allant jusqu’à quadrupler leurs rayons jeux vidéo avant et pendant Noël, les grands magasins réduisaient comme peau de chagrin leur achalandage dès janvier. Jeux vidéo et confiseries chocolatées, même combat. Une aberration qui était suivie, tout aussi traditionnellement, d’une déprimante période de creux à la sortie de l’hiver et au début du printemps.

L’âge ingrat

Le passage à l’âge adulte de la technologie et – moins perceptible malgré les tags + 18 ans du Pegi – du contenu, a tout de même fini par lisser cette folie. Après le coup de poker réussit de quelques sorties importantes hors créneaux habituels (le 1er Halo de Microsoft, alors challenger, sorti en mars 2002, puis Halo 3 en septembre 2007. Metal Gear Solid 2 et 3 en mars 2002 puis 2005…) les éditeurs ont fini par réaliser que tous les coups étaient permis sur les 12 cases du calendrier. Ou presque. Autant à l’écoute de leurs actionnaires que de leurs fans, les éditeurs ont repoussé la date limite, et suicidaire, du 25 décembre, se jouant surtout en novembre, à celle de la fin de leur année fiscale, fin mars. Une curiosité cette fois bien spécifique au jeu vidéo. Quand un éditeur s’engage auprès du marché et des consommateurs à sortir un jeu avant la « fin de l’année » il faut entendre, qu’elle soit explicitée ou pas, « avant la fin de l’année… fiscale » et non la calendaire qui régule la vie de la cité. Voilà une des raisons aussi qui explique pourquoi la presse spécialisée jeu vidéo se mêle autant de l’économie des entreprises du jeu vidéo. Un phénomène qui n’existe pas dans la presse cinéma voisine, par exemple, où les budgets des films et le cachet des acteurs suffisent à alimenter les fantasmes. La régulation des sorties de films calées, voire verrouillées par les productions US, des années à l’avance, ne provoque pas le suspens des dates de sortie des jeux vidéo, indécises ou fluctuantes quelques mois avant leur commercialisation. Étalée sur plusieurs années, la durée exacte de conception d’un jeu vidéo n’est pas encore planifiable de façon sûr. Intimement lié à l’évolution des technologies, celui-ci avance le plus souvent en terra incognita.

« Shock and awe »

Autre anomalie de ce marché atypique, attendre, comme on a pu le lire ici et là, que le guerroyeur Call of Duty Modern Warfare 2 du 10 novembre devienne la VENTE de « Noël ». « Des réservations records » triomphe l’éditeur Activision en s’abstenant bien de révéler des chiffres. 10 millions d’exemplaires et plus au 4e trimestre pour 500 millions de dollars de recettes en une semaine prédisent des analystes. Qu’une large frange de core gamers accrocs aux parties de guerre virtuelle en ligne réponde massivement à l’appel, peut-être, mais à l’heure où le public familial rejoint dans les boutiques un core gamer en voie de disparition ou, disons, de pacification, il y a de fortes chances pour qu’en terme de volumes, le nouveau Super Mario sur Wii ou le nouveau Pokémon Donjon Mystère sur DS fasse beaucoup mieux, sionon sur le moment, du moins dans la durée (le parc de consoles Wii cumule encore celui des Xbox 360 PS3 réunies, quant aux 114 millions de DS dans le monde…). Sans compter les jeux musicaux comme Guitar Hero 5, DJ Hero, Band Hero, Lego Rock Band ou Rockband Beatles qui font le cross over culturel et trustent les charts même lorsqu’ils donnent des signes d’essoufflement.

BANG à retardement

Un Call of Duty Modern Warfare 2 qui aura en tous cas réussi sa campagne médiatique. Au point d’autoriser son éditeur, en Grande-Bretagne, à vendre son jeu plus cher que d’habitude sans craindre de représailles. Au point aussi d’avoir fait fuir au 1er trimestre tous les candidats potentiels qui se seraient arc-boutés avant Noël les années précédentes. Une fuite en avant confortée par l’exemple du premier trimestre 2008 (d’une année fiscale commencée en avril donc) où une poignée de blockbusters prêts à tout (Grand Theft Auto IV, Mario Kart Wii, Wii Fit, Race Driver Grid, Rock Band, Metal Gear Solid 4) en pleine période creuse habituelle a boosté de façon spectaculaire les comptes des éditeurs. La plupart d’entre eux renvoie d’ailleurs, aujourd’hui, la chute des résultats du premier trimestre 2009 à l’absence de titres marquants en début d’année… fiscale. Si 2009 ne finit pas sur un BANG, ce ne sera pas la faute à l’absence de jeux de qualité cette fois-ci. Il faut d’ailleurs se demander si, en ce qui concerne le jeu vidéo, le meilleur cadeau de ce Noël 2009 ne serait pas de recevoir de l’argent de poche à dépenser après les fêtes.

Tsunami en 2 vagues

Restent ainsi en lice pour ce Noël, les jeux aux épaules assez larges pour attirer tous les regards. Les jeux de Nintendo déjà évoqués et dans leur élément naturel à cette période, y compris un Zelda sur DS, ou de Sega (Mario & Sonic aux Jeux Olympiques d’Hiver), les suites de blockbusters déjà affirmés comme Uncharted 2, Assassin’s Creed II, Ninja Gaiden Sigma 2 ou Left for Dead 2, et le nouveau chapitre The Ballad of Gay Tony de Grand Theft Auto. Les jeux de sports évidemment comme Colin McRae Dirt 2, Pro Evolution Soccer 2010, FIFA 10 et Forza Motorsport 3, et les adaptations à fuir de films et séries TV ou dessins animés. Quelques courageux, ou hyper pointus ou hyper kamikazes, comme les inédits et du coup intrigants Borderlands ou Brütal Legend, Dragon Age : Originis et The Saboteur chez un Electronic Arts beaucoup plus audacieux qu’il y a quelques années. Une lignée de jeux qui vaut déjà, pour ceux cités, son pesant d’or. Et qui ne font qu’esquisser la déferlante post Noël qui commence donc fièrement dès potron-minet en janvier, comme le claironne Sega, par l’inédit Bayonetta du respecté créateur japonais Hideki Kamiya, suivi par le poids lourd Army of Two : Le 40ème jour, l’inédit Dark Void de Capcom et l’ambitieux Mass Effect 2 chez Microsoft. À peine une petite respiration et les festivités reprennent avec, encore, des incontournables poids lourds comme BioShock 2, le culotté Dante’s Inferno et le bien connu Splinter Cell Conviction après plusieurs années d’absentéisme. En mars, les importants Battle Field : Bad Company 2 et Gran Turismo 5 tenteront de conclure, en attendant d’autres candidats potentiels qui pourraient se déclarer (Alan Wake, Max Payne 3, No More Heroes 2, God of War III…) cette fameuse année fiscale du jeu vidéo. Le bras de fer de Noël et la gueule de bois virtuelle n’auront jamais duré aussi longtemps.

François Bliss de la Boissière

(publié le 8 novembre 2009 sur Electron Libre)

 


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Noël 2000 : les jeux vidéo font leur cinéma

Ah, Noël, Disney, Dreamworks…, tant de films et de dessins animés merveilleux ! Ah, Noël, tant de rêves sur pellicule transformés en cauchemar de pixels par la société marchande ! A moi, le Grinch !

Le Grinch aura beau râler, se morfondre sur sa montagne en maudissant les autres, se venger d’une humiliation enfantine en « tuant » Noël, la magie de cette période de l’année ne mourra pas, ne peut pas mourir. Même si nous prenons un par un les rêves de pellicules pour dénoncer leur exploitation mercantile en jeu vidéo, rien n’y fera.

Alors, loin de nous l’idée de gâcher votre Noël, si voulez acheter l’adaptation en jeu de tel ou tel film magique de Disney, ou de Dreamworks, vu au cinéma, rien ne vous retiendra vraiment tant l’image de marque est forte. Et l’on vous comprend, nous aussi nous avons plongé. Mais pour un jeu correct, combien de projets bâclés, combien ?

Notre recommandation : allez voir les films. Si vous voulez vraiment acheter les jeux, voilà ce que nous en pensons. Ne venez pas dire qu’on ne vous aura pas prévenu. Suivez le guide concocté avec patience par JB…

Cinq jeux vidéo pour cinq films de Noël

  • La Route d’El Dorado un dessin animé méconnu pour un jeu plus que convenable
  • Dinosaure un jeu rustique pour un film drôlement léché
  • The Grinch un faux méchant qui amuse dans le film mais qui énerve dans le jeu
  • La Momie film comme jeu sont à prendre avec des pincettes
  • Chicken Run poule joyeuse dans le film égal poule mouillée dans le jeu
François Bliss de la Boissière

(Publié sur Overgame le 21 décembre 2000)

Noël 2000 – les jeux vidéo font leur cinéma sur Overgame