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Réalité virtuelle, premier plongeon : partir, ne plus vouloir revenir

Je voulais y croire mais il fallait me convaincre pour de vrai. C’est fait. J’ai goûté à la vie virtuelle, brutalement, irrémédiablement conquis. Et ce n’est même pas le leader officiel de la VR Oculus Rift qui m’a fait plonger, mais le procédé PlayStation VR ex Morpheus de la PS4. Il sera sans doute premier vrai portail populaire vers la réalité virtuelle.

PlayStation VR (DR Techinsider)

Avant toute chose, parce qu’une image vaut mille mots, voir cette vidéo de London Heist sur PlayStation VR…

Fervent croyant en la prochaine réalité concrète de la réalité virtuelle, je n’étais habité que de curiosité avide au moment d’essayer enfin la technologie Sony lors de la journée média du Paris Games Week 2015. Surtout que mes deux seuls précédents essais de casques VR m’avaient laissé un goût d’inachevé.

Samsung Gear VR et Oculus Rift ? Passez votre chemin

J’ai ainsi eu l’occasion d’essayer lors de sa commercialisation aux USA le Samsung Gear VR qui utilise un Galaxy Note en guise d’écran. Si l’expérience était plaisante, j’ai quand même eu l’impression que nous étions encore loin de l’immersion promise. La définition de l’écran insuffisante, la surface de visibilité limitée devant soi, et les programmes rudimentaires disponibles, y compris la présence dans un concert live, m’avait laissé circonspect. Désolé de décevoir l’initiative Samsung Gear de John Carmack, ex idSoftware, devenu responsable de ce développement mobile chez Oculus Rift et donc Facebook. Pour un gamer technophile, pas de compromis possible. La totale technologique, ou rien.
J’ai aussi essayé l’Oculus Rift original version DK2 accessible parfois à La Gaîté Lyrique de Paris. Trop rapide, avec un casque mal ajusté sur le crâne, une définition d’image discutable, le petit trajet en wagon minier était certes nettement plus immersif que le Samsung Gear VR, mais il fallait surtout deviner le potentiel au lieu de le ressentir pleinement. Même si cet essai a conforté mon enthousiasme de rêveur enfantin.

Le grand plongeon

Après la démo du PlayStation VR au stand Sony du Paris Games Week hier soir, je me rends compte que j’étais heureusement encore sensoriellement loin du compte. Cette fois fût la bonne. Plus de doute, l’immersion physique est réelle. À tel point qu’il faut quasiment lutter à l’intérieur de soi pour ne pas se laisser totalement aller aux émotions que la situation impose de facto.
La démo choisie, à ma place, de l’émotionnellement violent London Heist « parce qu’il s’agit de la plus immersive présente ce jour au Paris Games Week » a finalement été effective pour moi. Justement parce qu’elle m’a obligé à ne pas me laisser aller comme j’y étais prêt. Je suis en effet prédisposé à disparaître dans un monde virtuel imaginaire, mais certainement pas prêt à me laisser malmener par un inconnu menaçant ! Ce qui est le cas de la première partie de la démo interactive de London Heist (si vous n’avez pas encore regardé la vidéo, il est encore temps). Au préalable la jeune hôtesse qui assiste la démo donne quelques instructions élémentaires, demande de s’assoir sur une (vraie) chaise et prévient qu’une fois debout, elle enlèvera la chaise et de ne pas s’inquiéter. Et pourquoi me mettrais-je debout demandais-je en sachant, prudent, qu’il vaut mieux ne pas se déplacer dans un espace réel avec un casque supprimant quand même la vue ? « Vous verrez bien » tente de me rassurer la jeune assistante. « Tkt » dirait un gamin que je connais en m’inquiétant deux fois plus. Mais on est là pour se lancer, pas pour tergiverser, surtout que la file d’attente des candidats est longue, le temps compté et précieux.

Casque VR sans gêne

Trois secondes dans le jeu et je suis déjà incapable d’avoir un avis sur le casque Sony lui-même et son confort. Tout au plus puis-je confirmer qu’il ne m’a pas gêné du tout pendant toute la démo jouable, qu’il m’a paru léger et confortable. Il est bien resté en place sans m’écraser le crâne ou glisser, y compris quand j’ai levé et baissé la tête, très vite même puisque cela est possible au milieu d’un décor à 360° qui existe (le verbe « s’afficher » ne correspond plus à l’expérience) sans rémanence ni décrochage. Seul le casque audio installé par dessus m’a créé une sensation d’étouffement exagérée. Mais c’est un ressenti personnel du pointilleux ergonomique que je suis. En réalité j’étais déjà en train de regarder tout autour de moi la pièce où je me retrouvais.

Voilà donc à quoi sert l’invention du relief

Et je me suis pris en pleine figure le détail technique le moins évoqué de la VR de ce début du 21e siècle : la 3D stéréoscopique ! Et d’ailleurs je n’y ai pensé qu’après la démo, pas pendant. Et pourtant c’est d’abord elle qui trompe les sens avant même de se rendre compte en tournant la tête dans tous les sens que, oui, je suis immergé dans un hangar enfumé. Le premier effort du « testeur » d’une nouvelle technologie que je me devais de représenter a donc d’abord consisté à détourner les yeux du gros bras musclé assis juste en face de moi. Pas si facile. Dans la vraie vie personne ne lâche le regard d’un type qui vous fixe d’un air mauvais en vous envoyant de la fumée de cigare jusqu’au visage. S’y appliquer dans un espace de réalité virtuelle consiste en fait déjà à créer une rupture dans le jeu, une tentative de reprendre le contrôle et de ne pas se laisser aller à croire « pour de vrai » ce qui se passe. Cela ne brise pas le jeu qui continue à son rythme mais on casse déjà les règles du « gameplay » super FPX (first person experience). J’ai donc bravement regardé tout autour de moi pour constater avec effarement que j’avais vraiment la sensation d’avoir été téléporté dans une pièce sombre, inquiétante, avec des éclairages minutieusement répartis. Un hangar de bonne proportion dont j’ai mesuré très vite les distances grâce à un ressenti tout à fait tangible de la spatialisation tout autour de moi. Dans cette 3D relief globale, contrairement à celle du cinéma en salle ou à domicile avec des lunettes 3D à la vision limitée, les effets d’ambiance, de lumières, de fumées, de poussières donnent une présence physique totale. Les bruitages d’ambiances discrets dans les oreilles confortent et appuient évidemment ce que l’on voit.

Le grand face à face virtuel

Le type en marcel en face de moi m’interpelle et me parle de plus en plus violemment. Irrité de mon manque d’attention il se lève brusquement en repoussant sa chaise et fait un petit pas rageur vers l’avant. Impossible de ne pas tressauter. Le réflexe de protection instinctif et physique vient de plus loin encore que le réflexe habituel du pratiquant jeu vidéo. Là encore ma tentative de désamorcer la situation tendue en rigolant sous le casque cachait à peine une terrible sensation d’inquiétude physique. On a beau jouer les décontractés à qui on ne la fait pas, on sent venir le passage à tabac en totale passivité. Et l’anxiété s’installe au creux du ventre malgré soi. Le type s’agite maintenant debout, se rapproche encore, chalumeau allumé à main. On est assis, la présence massive du malabar nous domine, nos muscles se tendent parce que, hé, c’est un jeu vidéo n’est-ce pas ? Pas parce qu’on a vraiment peur du gros bras bien sûr. Bien sûr. Et le jeu va bien nous demander à moment ou à un autre de réagir avec nos petites mains agrippées aux deux manettes PlayStation Move, non ?
Un smartphone sonne dans la poche du bonhomme prêt à exploser. Il entame une conversation qui le calme à peine avant de se résoudre à nous tendre le téléphone. Le piège à enrôlement ici consiste à devoir quand même obéir au type qui nous ordonne de nous lever pour attraper le téléphone. On résiste, il insiste et je n’ai pas détecté de gestes ou de mots en boucle flagrants façon jeu vidéo en mode automatique. Il faut donc bien se résoudre à jouer le jeu de l’autorité et se lever. Le bras droit se tend instinctivement vers le téléphone, une main gantée flottante apparait dans la pièce (« écran » ne correspond plus), la mienne aucun doute, et j’appuie sur la gâchette comme demandé tout à l’heure par l’hôtesse de la vie réelle pour attraper le smartphone. Je le porte naturellement à l’oreille pour écouter le message de quelqu’un. Ce mélange de gestes réels dans un espace virtuel imaginaire est bien étrange, troublant. Fondu au noir.

Pourquoi on y croit ?

À cet instant entracte de la démo il faut revenir sur le pourquoi et le comment de l’impact réussit de l’immersion. London Heist prouve que certains développeurs maitrisent déjà drôlement bien les conditions techniques et artistiques d’une immersion physique et psychologique. Cela augure bien de la suite et de la vitesse des progrès. La présence tangible, incontournable, d’un corps physique humain, quasi charnel, en face de soi est bien le premier morceau de bravoure accompli par Heist. Bon acting en performance capture, certes, mais aussi bonne évaluation du volume du corps dans l’espace tridimensionnel, et en particulier de ses gestes et de ses rapports de distance avec nous, qui n’avons pas de corps à part les mains (ou alors j’ai oublié de regarder mes jambes). Dès que l’on croit à une présence près de soi dans ce monde virtuel, c’est gagné. Car, maligne, la séquence nous laisse le temps de nous ajuster. Le malabar sûr de lui et de sa position est assis quasi immobile devant nous. Il attend visiblement que nous reprenions connaissance en nous narguant. C’est le joueur étranger à la situation en revanche qui s’agite sur sa chaise pour découvrir l’endroit où il se trouve. Exactement comme dans la peau du personnage que nous jouons malgré nous : coincé sur une chaise, se réveillant sans doute après avoir été estourbi et trainé dans ce hangar à son insu. Surtout que de films en séries, cette scène là du héros mis en mauvaise posture par de violents truands est bien connue. On l’investi en un rien de temps. Avec en plus cette petite voix intérieure qui dit : non, ils ne vont pas nous faire ce coup-là ? Eh bien si. Et c’est un exemple parfait.
La seule chose que les programmeurs peuvent encore ajouter serait sans doute que le personnage réagisse vraiment à nos positions de têtes. Je ne crois pas voir remarqué que ce fut le cas. Quand nous détournons la tête pour ignorer royalement notre vilain interrogateur, celui-ci pourrait, devrait, se replacer devant nous, ou nous demander de le regarder en face. Cela viendra sans aucune doute.

Acte deux : la fin des minis jeux de tiroir

Le deuxième acte de la séquence rend les choses plus concrètes cette fois, et plus jeu vidéo. Du classique en terme de jeu vidéo, mais de l’inédit en qualité d’immersion et de sensation d’y être. La scène commence debout. La chaise du monde réel n’est plus derrière moi, j’ai vérifié d’un coup de talon. Une voix dans l’oreillette (on suppose) demande de fouiller un bureau-secrétaire devant soi, de trouver une clé dans un tiroir, de se méfier des vigiles qui font la ronde – on commence à voir leurs lampes torche au loin – et d’attraper un flingue dans un des tiroirs si nécessaire. Nos deux mains gantées flottent devant nous. On approche de la poignée d’un des tiroirs, on appuie sur la gâchette du PlayStation Move, on tire vers soi et le tiroir s’ouvre naturellement, de l’exacte distance tirée. Je referme d’ailleurs aussitôt le tiroir et refait le geste plusieurs fois. Et chaque fois ça marche, je tiens le tiroir bien en main. Adieu toutes les raideurs des ouvertures de tiroirs de The Last of Us à SOMA (pour n’en citer que deux). Pareil pour le tiroir d’à côté et le grand en dessous. Le meuble devant moi existe donc concrètement dans une semi obscurité. J’attrape une lampe torche de la même manière instinctive avec la main droite. J’éclaire mieux le meuble. Je n’aurais pas le temps de trouver la clé en question, je m’amuse trop à ouvrir et fermer les tiroirs, à lâcher la lampe et à la reprendre en serrant bien la main. Je trouve aussi ce qui ressemble à des chargeurs de révolver dans un tiroir. Je les prends sans effort et les pose sans ménagement sur le bureau. J’attrape, je lâche, j’attrape, je jette, tout ça avec mes petites mains virtuelles qui ne le sont plus tout à fait.

Légitime jouissance

La grande salle devant moi s’éclaire brusquement. Des tireurs en costumes se faufilent partout et se cachent derrière les fauteuils, style Uncharted. J’entends des coups de feu et des balles siffler à mes oreilles. La voix dans l’oreillette me suggère de me cacher derrière le secrétaire. Comment ça ? Comment ça ? Je me baisse, je mets un genou en terre, pour de vrai, le sol est dur, et je vois bien que mon regard se retrouve désormais au ras du bureau, à l’abri des balles. Mon dieu. Action, j’y suis ! Je me relève un peu, ouvre en catastrophe un tiroir oublié, je vois le flingue. Je ne me pose pas de questions je le prends de la main gauche qui m’est naturelle et, oui, je commence à viser les silhouettes et je tire. Time Crisis, Blue Estate nous revoilà. Mais dedans, en plus joli, en plus immersif c’est sûr. Le révolver tressaute à chaque balle, l’impact est juste, la visée aussi. Le PlayStation Move vibre-t-il ? Je ne sais plus, là sur le moment je le crois. Plus de balles ! J’attrape de la main droite disponible un des chargeurs sur le bureau. Mes deux mains se rapprochent instinctivement, le révolver d’un côté, le chargeur de l’autre. Ai-je fait ça toute ma vie ? Le chargeur s’enclenche sans effort dans la crosse du révolver. Clik Klak, c’est reparti ! Mais d’où viennent ses balles qui me frôlent de plus en plus alors que je suis accroupi ? Bon sang ! Il y a un balcon bien sûr, deux mêmes ! Il suffit de lever la tête idiot. Et le bras, et de viser Instinctivement. Je ne crois pas que je puisse vraiment m’éloigner du bureau ou le contourner, et de toutes façons je ne le souhaite pas tant qu’il y a des tireurs embusqués. La sensation jouissive de jouer au cow-boy retranché derrière son bar dans une attaque saloon est trop forte. Et si je penche le flingue de côté façon gangsta pour viser, ça marche ? Oui, ça marche et la frime idiote qui va avec. Si on doit faire des choses, même au goût douteux, autant les faire avec du style. Les assaillants sont tous à terre. Fondu au noir.

Partir, ne plus revenir

24h plus tard j’ai encore la tête dans cette démo, dans cet autre monde où évidemment un garçon ordinaire se délecte de défier un gros bras et de manipuler un pistolet. Mais demain, demain je serai au volant d’une voiture, je me ferai peur au milieu d’une maison fantôme, je me faufilerai un chemin dans la jungle entre les pattes de dinosaures. David Cage si tu me lis, tu ne me feras pas croire que ton Detroit ne fonctionnera pas en VR. James Cameron j’en suis sûr, avec toute la technologie de filmage réel/virtuel que tu t’es inventé, ton ou tes prochains films Avatar pourront être présentés en full VR. J’ai goûté à une seconde life. Je sais qu’on ne fera pas que s’y entretuer et que grâce au talent sensible de certains artistes (Jenova Chen, Quantic Dream, Media Molécule…) on saura aussi s’y aimer. Alors je n’attends plus qu’une chose : y retourner. Demain, tous ensemble, nous allons imploser la matrice.

François Bliss de la Boissière

 


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Les jeux vidéo entrent (encore) dans une nouvelle dimension

Toujours pas arrivé à maturité, le medium jeu vidéo continue d’évoluer organiquement avec les progrès informatiques. Depuis les percées inattendues de la Wii avec sa télécommande à reconnaissance de mouvements et des interfaces tactiles de la DS puis de l’iPhone, le loisir interactif a entrepris une nouvelle mutation. Le Graal vidéo ludique se situe désormais dans l’interface homme-machine, la Natural User Interface (NUI) comme le résume Steve Ballmer, ou plutôt, dans la disparition de l’interface. Avec l’arrivée des images en relief en parallèle, le jeu vidéo s’apprête à basculer encore une fois dans de nouvelles dimensions. Petit récapitulatif de ce qui attend les joueurs, et le monde, au lendemain de la techno messe annuelle du CES de Las Vegas. EN 2010, LE JOUEUR ET L’ÉCRAN PRENNENT CORPS.

PlayStation Move de Sony
PlayStation Move de Sony

Anticipé depuis la première présentation au salon E3 de Los Angeles en 2009, le projet dit Natal associé à la Xbox 360 sera bien commercialisé fin 2010. Microsoft a profité de sa conférence au CES pour le confirmer. L’interface inédite permettant de manipuler les menus et les jeux en bougeant simplement la main en direction de l’écran, voire le corps entier, a le potentiel de bousculer la conception générale des jeux vidéo. Bien que Sony ait déjà initié sur PlayStation 2 des jeux où une webcam reconnaît et incorpore les mouvements des joueurs avec la gamme de produits ludiques EyeToy, et que Nintendo ait vraiment déclencher le paradigme shift de l’interface de jeu avec la Wiimote, il faut attendre de Microsoft une volonté forcenée de reprendre, si l’on peut dire, la main, sur ce nouveau créneau. La popularité grandissante de la PlayStation 3 / lecteur de Blu-ray menaçant chaque jour la Xbox 360 de se retrouver en 3e acteur des consoles de salon (39 millions vendues dans le monde), le géant de Redmond va positionner ce projet Natal comme un nouveau départ de sa console. Un « reboot » symbolique à mi chemin de la durée de vie de cette génération de consoles de salon qui nécessitera juste l’achat de l’extension Natal (une caméra de détection à infra-rouge à placer sous l’écran) pour avoir l’impression de changer de hardware. Une politique de rhabillage de surface déjà réussie avec les différentes versions de l’interface du logiciel interne de la Xbox 360. Microsoft revendique avoir convaincu 70 à 80 % des éditeurs de jeu vidéo de développer des jeux Natal, en plus de ceux développés par ses propres studios, notamment les légendaires équipes britanniques de Lionhead (Fable) et Rare (Perfect Dark, Banjo Kazooie…).

Virtual copieur

Pas toujours premier sur les idées mais prompt à s’engager sur des nouvelles voies, Microsoft a également annoncé la naissance d’un nouvel espace de jeu virtuel. Une « Game Room » où les avatars des joueurs pourront se retrouver pour pratiquer d’anciens jeux vidéo dits d’arcade. Microsoft cherche ainsi à mixer le Home stagnant de la PlayStation 3 (malgré ses 10 millions d’inscrits) où les avatars des gamers se retrouvent dans des espaces de sociabilisation et de jeux façon Second Life, et la Virtual Console de la Wii qui permet de télécharger et jouer des jeux d’anciennes consoles disparues des années 80-90 et 2000. Microsoft ayant déjà appliqué brillamment l’idée des petits avatars de la Wii à son Xbox Live, il faut s’attendre là aussi à ce que la société américaine s’engouffre sans gêne ou pudeur dans les voies ouvertes par les japonais Sony et Nintendo. La trentaine de jeux historiques de la Game Room (Asteroids, Centipede, Super Cobra…) se pratiqueront en HD, éventuellement à deux, à partir des cabinets d’arcade originaux. Les nouveaux jeux Xbox Live Arcade créés par la communauté auront également leur place et leurs bornes d’arcade. La simulation accessible sur Xbox 360 et sur PC ira jusqu’à permettre de payer à la partie (en points Microsoft) de la même manière que l’on glissait des pièces de monnaie dans les cabinets d’alors. Mille jeux pourraient se rendre ainsi disponibles dans les trois prochaines années.

Convergences et relief

Au même CES, Sony a plutôt remis en avant, sans la nommer ainsi, une politique de convergence. Interne avec la réorganisation de ses circuits de distribution faisant passer les produits Sony et Sony Computer par les mêmes canaux de distribution, puis la mise en place d’une nouvelle entité baptisée Sony Network Entertainment, Inc. (SNEI) qui centralisera les stratégies des différentes branches de la société. Du côté public, le PlayStation Network actuellement destiné à la PS3 et à la PlayStation Portable se rendra accessible à travers toutes les gammes de produits Sony connectés, comme désormais les écrans Bravia, les lecteurs Blu-ray et bien sûr les PC Vaio. Plus remarquable fut l’absence d’annonce concernant le projet de manette à reconnaissance dans l’espace PS3, lui aussi inspiré par la Wiimote de Nintendo. Présenté à l’E3 2009 puis envisagé pour une sortie au printemps 2010 lors du Tokyo Game Show de septembre, le procédé qui sera exploitable sur de nouveaux jeux comme sur d’anciens remixés (un Resident Evil 5 : Director’s cut notamment, mais aussi Flower, LittleBigPlanet et d’autres) est resté bien discret. Un report du lancement le rapprochant du Project Natal de Microsoft prêt à se donner les moyens de prendre la vedette ne serait pas une bonne chose pour Sony. La société japonaise a en revanche confirmé au CES que la PlayStation 3 sera bien capable d’afficher des programmes en relief après deux mises à jours de son firmware courant 2010. Une première pour les jeux et une deuxième un peu plus tard pour les films sur Blu-ray. Avec Panasonic, Samsung, LG, et Toshiba, Sony a sorti la grosse artillerie médiatique et technologique pour préparer l’avènement du relief dans les foyers avant la fin 2010. Le jeu vidéo devrait essuyer les premiers plâtres.

Influences

Une bonne idée restant rarement orpheline, les sociétés Razer et Sixense Entertainment ont aussi profité du CES pour présenter un procédé de reconnaissance de mouvements adapté aux jeux sur PC. Démonstration appuyée par le jeu Left for Dead 2 du respecté studio Valve. Plus tard qu’on aurait pu croire depuis l’idée lancée par la Wii en 2006, le coréen LG a présenté des télécommandes de télévision à reconnaissance dans l’espace façon Wiimote nommées Magic Wand. Ce n’est pas du jeu mais choisir ses menus en pointant vers l’écran devient ludique, pour ne pas dire évident une fois que tous les constructeurs s’y seront mis.

Poker menteur, par omission

Les deux gros constructeurs et leaders high-tech de l’industrie du jeux vidéo ayant mis sur la table de jeu de Las Vegas l’essentiel de leurs cartes, les regards se tournent inévitablement vers les deux players absents du CES. L’historique Nintendo qui refuse toujours de laisser filtrer une version améliorée de sa Wii, et le nouveau challenger Apple, dont la tablette à tout faire, y compris le jeu, espérée pour fin janvier, pourrait changer la donne comme l’iPhone est en train de changer les règles du gaming portable. Quoi qu’il en soit, une chose reste sûre. Du relief à la reconnaissance de mouvement dans l’espace, assis ou debout, immobile ou en mouvement, cérébral ou physique, le jeu vidéo va encore une fois franchir et explorer de nouveaux espaces, de nouvelles dimensions. Aux sens physiques et mentaux. Et sans doute entrainer le reste de l’industrie digitale et high-tech à sa suite.

François Bliss de la Boissière

(Publié en janvier 2010 sur Electron Libre) 

 


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